Le magasin de Louis Génin, à l’angle de la rue Saint Jean et de la rue Bénit à Nancy, est le premier édifice à structure métallique apparente à servir en partie d’habitation.
En 1876, Jules Génin, marchand de grains décide de s’installer à Nancy. Son magasin occupera alors le rez-de-chaussée d’un petit immeuble, situé à cet emplacement, à l’angle de la rue Bénit et de la rue Saint-Jean. Il résidera à cette adresse jusqu’en 1895.
Quelques années plus tard, en 1900, plutôt que de rénover cet immeuble de la rue Saint-Jean qui accueille ses activités, Jules Génin décide de le reconstruire entièrement…
L’immeuble est alors construit rapidement, de 1900 à 1901 pour Jules Génin et son épouse Camille Louis.
La Graineterie Génin est le fruit de la collaboration d’Henri Gutton, architecte ingénieur polytechnicien et de son neveu Henry Gutton, architecte.
Henri Gutton est né à Paris en 1851 et mort à Nancy en 1933.
Cet ancien élève de l’Ecole polytechnique et de l’Ecole des Beaux-Arts est de retour à Nancy en 1876. Il crée par la suite la société des Architectes de l’Est de la France.
Très compétent sur les programmes nouveaux, il s’intéresse aussi aux problèmes du développement urbain et de l’habitat social. Il construit également plusieurs maisons particulières dans le goût moderne avec son associé Joseph Hornecker.
Henry Gutton quant à lui est né à Paris en 1874 et mort à Nancy en 1963.
Souvent confondu avec son oncle il est diplômé de l’Ecole Nationale des Beaux-Arts. Talentueux, il obtient une médaille d’or à l’exposition universelle de 1900. Il a également participé au mouvement nancéien entre 1901 et 1905 où il collabore avec Emile André et son oncle au projet du parc de Saurupt, puis crée quelques pièces de mobiliers.
A partir de 1905 Eugène Corbin lui confie la construction et l’aménagement des Magasins Réunis à Paris, mais surtout le Grand-Bazar de la rue de Rennes à Paris, son chef d’œuvre, construit en 1906.
Il fera les ornements des bouches du métropolitain à Paris.
Frédéric Schertzer participe activement à l’édification du bâtiment en y apportant tout son savoir de ferronnier.
La céramique est exécutée par Alexandre Bigot et les quatre verrières de couleur violacés sont signées Jacques Gruber.
A la fin de l’année 1901 la Graineterie Génin se dévoile enfin au public.
Les Nancéiens se pressent à l’angle de la rue Saint-Jean pour assister à l’événement. L’immeuble suscita l’étonnement ; effectivement on voyait pour la première et dernière fois d’ailleurs un édifice qui laisse entièrement apparaître sa structure métallique (La structure métallique supportait une charpente en bois) , et qui plus est sur l’axe commercial privilégié de Nancy.
Les trois niveaux supérieurs étaient dévolus à des logements.
Au rez-de-chaussée il y avait des grilles coulissantes en fer forgé, qui étaient relevées à l’ouverture du commerce, et qui protégeaient les marchandises exposées dans les vitrines sans les masquer.
Quant à la décoration, elle se concentre sur l’oriel et les baies inférieures.
À la base de l’oriel, des fleurs et des capsules de pavots en fer forgé rappellent l’orientation commerciale du magasin. Au sommet, les extrémités des montants d’acier se terminent par des motifs végétaux stylisés, rappelant ceux des grilles.
Entre, on peut deviner les appartements de la famille et notamment la pièce qui constitue l’oriel : le fumoir, lui aussi très ornés par le fer mais surtout par des vitraux.
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L’architecte Emile André a installé en 1902 ses bureaux au deuxième étage.
Malheureusement, le très beau magasin Génin va très vite faire parler de lui pour d’autres raisons.
En février 1902, soit quatre mois après l’achèvement des travaux, un incendie détruit l’oriel et les combles. Alors pour la troisième fois, Jules Génin entame des travaux. Mais cette fois-ci, il reconstruit le bâtiment à l’identique. Par la suite le décor peint au pochoir des façades disparaîtra ainsi que la marquise de la porte et les épis de faîtage de la flèche.
Pendant soixante-dix ans l’édifice conservera son activité de graineterie avant d’accueillir une brasserie puis une banque.
Menacé d’une destruction totale en 1976, le bâtiment est finalement classé et protégé au titre des Monuments Historiques puis restauré 3 ans plus tard, en 1979.
Cette fantaisie architecturale qui ne laisse pas indifférent et qui reste le seul bâtiment à structure métallique apparente de Nancy, tente de réaliser la synthèse entre structure et décor et illustre parfaitement le conflit architectural de la fin du XIXème siècle, qui oppose architectes et ingénieurs.
Il reste le seul bâtiment de ce type en France.
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sources
http://exposeartnouveau.canalblog.com/archives/2008/05/04/9052193.html
http://hidaseconde.blogspot.fr/2015/11/nancy-un-foyer-de-lart-nouveau.html
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